Le numéro 4 du « Vilain petit canard » bimestriel créé par Hélène Maurel et ses amis est un enchantement. D’abord un plaisir des yeux. Illustrations, dessins magnifiques créés pour nos enfants, sont un régal pour les yeux de tout âge. Les textes s’adressent à tous et sont susceptibles après les attentats de Janvier de faire comprendre à tous ce que sont racisme, antisémitisme, phobie de l’islam et rejet de tous ceux qui ne nous ressemblent pas. Vous voulez en savoir plus ? Abonnez vous, pour vous ,vos enfants pour la respiration de tous .www.levilainpetitcanard.fr

Vous voulez en savoir plus gros gourmands ! et bien voilà un extrait du Canard reproduit avec l’aimable autorisation de la directrice de la publication.

8-Les-colons

Antisémitisme, islamophobie et racisme.

 

Avant les tueries, on baignait déjà dans une ambiance raciste : les Roms stigmatisés et harcelés, la figure de l’arabe-musulman érigée en repoussoir, les Juifs accusés de tous les maux… Depuis le 7 janvier, des centaines d’actes islamophobes (attaques contre des mosquées, menaces et agressions) et antisémites (profanation de tombes dans un cimetière juif, menaces et agressions) ont été recensés. Deux jours après l’attentat, un journaliste a osé déclarer publiquement : « les musulmans sont un problème en France ».

 

C’est quoi le racisme ? Le mot « racisme » est formé à partir du mot race et du suffixe-isme. Il définit une vision du monde dans laquelle la race permettrait de comprendre les rapports humains. Le mot « race » est un vieux mot français, mais il renvoyait avant le XIXe surtout à l’idée de groupes, sa transformation en « race » au sens biologique date du XIXe. Il y a plusieurs racismes qui cohabitent aujourd’hui.

 

Le racisme biologique

Le racisme biologique prétend qu’il existe des races d’humains. Cette pensée en « race » s’est développée dans les pays colonisateurs comme la France, dans laquelle se sont créées des sociétés scientifiques pour étudier les populations qui peuplent l’empire dans le but d’établir une hiérarchie entre les « races » (la « race blanche » étant tout en haut).

 

 » il faut deux noires pour une blanche »

Le but était de justifier la colonisation, c’est-à-dire « la conquête par des nations européennes de territoires dont les populations étaient considérées comme inférieures ou retardées sur le plan de leur évolution historique », comme l’écrit Alexandre Messager dans Les mots indispensables pour parler du racisme, paru chez Syros.

 

Or il n’existe pas de race humaine au sens biologique du terme comme l’explique cet excellent livre : « la mixité génétique de l’espèce humaine est telle que, si vous avez besoin d’un don d’organe, vous avez autant de chance de trouver un donneur compatible dans votre famille en France par exemple qu’au Japon, en Argentine, au Kenya ou encore en Alaska. ».

 

Le racisme culturel

Il existe aujourd’hui un racisme culturel. Il s’agit cette fois d’affirmer que les cultures sont inconciliables entre elles. Par exemple, on pense que les « musulmans » et les « chrétiens » ne peuvent pas vivre ensemble parce que leurs cultures sont différentes. Ce point de vue constitue la théorie du choc des civilisations. Celle-ci stipule que la terre est divisée en zones culturelles, qui vont se manger les unes les autres jusqu’à la victoire de l’une d’entre elles. C’est ce que prétend le Front national.

Ils disent qu’il est impossible de vivre avec ceux qui ne seraient pas descendants d’Européens car leur culture est trop différente, incompatible avec la culture prétendue française. L’« échec de l’intégration » – c’est-à-dire la transformation en « bons français » des immigrés – en serait la preuve.

Derrière l’idée de culture se cache à nouveau une idée naturelle. Elle sous-entend que nous serions incapables de changer pour cohabiter les uns avec les autres.

Nous, on pense exactement le contraire : les sociétés, comme les individus, sont le fruit d’évolutions et de mélanges, rien ni personne n’est de toute éternité comme ceci ou comme cela (sauf peut-être les cailloux, et encore !)

 

C’est quoi l’islamophobie ?

Au sens propre du terme, nous parlons ici de la peur de l’islam.

Il y a un vieux racisme anti maghrébin en France, qui depuis les attentats du 11 septembre (commis par des personnes se revendiquant de l’islam) s’exprime plus facilement sous le masque de cette peur de l’islam : en gros, les musulmans oppresseraient les femmes, tous les Arabes seraient musulmans, et tous les musulmans seraient des terroristes en puissance. C’est oublier, d’une part, que les trois quarts des victimes des djihadistes dans le monde sont musulman-es. Et que d’autre part s’il est vrai que l’islam fondamentaliste1 est TRÈS dangereux (on ne souhaite à personne d’être femme, homosexuel-le ou opposant-e politique en Arabie Saoudite ou en Iran, encore moins de croiser la route des fanatiques2 de Daesh), il existe mille manières de vivre sa religion, et ça vaut pour les musulmans comme pour les chrétiens et les juifs : tous et toutes ne sont pas des brutes intégristes ! Toutes les religions peuvent être interprétées de manière oppressive et sexiste. Au nom des valeurs chrétiennes, certain-es luttent contre la contraception et l’avortement et les soi-disant « théories du genre ». Au nom d’une certaine orthodoxie juive, un journal a EFFACÉ les femmes de la photo représentant les chefs d’État à la manifestation du 11 janvier à Paris.

 

C’est quoi l’antisémitisme ?

L’antisémitisme est le rejet ou la haine des personnes juives.

Le rejet des Juifs est très ancien en Europe. Il a d’abord existé pour des motifs religieux. Les chrétiens reprochaient aux Juifs d’avoir tué Jésus Christ. Ils en ont fait des boucs émissaires, c’est-à-dire les responsables des malheurs qui s’abattaient sur tous les humains. Ce rejet religieux des Juifs s’appelle l’antijudaïsme.

L’antisémitisme est la forme moderne de l’antijudaïsme : il superpose et mélange le rejet d’une religion, des cultures juives et le rejet d’un groupe considéré comme racial.

L’antisémitisme, comme son papa l’antijudaïsme fait des Juifs des boucs émissaires, coupables des difficultés du monde. Quand  les nazis ont été au pouvoir en Allemagne (janvier 1933 – avril 1945) et durant le régime de Vichy en France (juillet 1940 – août 1944), l’antisémitisme était étatique, c’est-à-dire qu’il était inscrit dans les lois mêmes de l’État. Les Juifs étaient exclus de la société et inférieurs aux autres légalement. Cela a conduit à la Shoah, l’extermination physique de millions de Juifs.

 

C’est dans les années 1860, dans une Europe où émerge l’idée d’égalité des citoyens, que le terme antisémitisme a été inventé par Wilhelm Marr, un Allemand, pour exprimer un racisme contre les peuples « sémites » (invention de son

cru pour « définir » les Juifs et les Arabes). NB : Ces peuples n’existent pas, ce qui existe ce sont des langues sémitiques comme l’arabe, l’éthiopien, l’hébreu. C’est-à-dire des langues dont le berceau est la grande Mésopotamie. Comme son nom ne l’indique pas, ce racisme visait en fait uniquement les Juifs. Le problème de Marr était que les Juifs, devenus citoyens, s’étaient fondus dans la société : ils n’étaient plus reconnaissables. Selon lui, il fallait donc affirmer leur caractère de race à part et dangereuse pour « protéger » l’Allemagne.

 

Quelques exemples de ses idées moisies, et malheureusement toujours en circulation :

– Ils seraient tous riches.

Cette idée est très répandue depuis le Moyen-âge et s’est perpétuée avec la naissance du capitalisme. Elle s’appuie sur l’existence de banquiers de confession juive dont la famille Rotschild est l’exemple le plus célèbre. La tradition des banquiers juifs remonte à l’époque où la religion chrétienne interdisait l’usure aux croyants, c’est-à-dire le fait de faire de l’argent avec l’argent. Mais les prêts d’argent étant bien utiles, ils ont été possibles grâce à des Juifs vivant en Europe. Depuis plusieurs années maintenant, la majorité des banquiers ne sont pas juifs.

 

Légende :

  1. Le fondamentalisme désigne l’attachement strict aux principes originels d’une doctrine, généralement religieuse.

 

  1. Le fanatisme c’est considérer qu’il n’y a aucune limite  pour faire triompher une cause

ou une doctrine.

 

– Ils dirigeraient le monde et les États.

C’est la particularité de l’antisémitisme, par rapport aux autres racismes : le fait de croire et dire que les Juifs, en tant que groupe uniforme, veulent posséder le monde. L’antisémitisme est un racisme et un complotisme. Ces affirmations reposent souvent sur des amalgames ou la mise en avant de personnalités juives présentes dans des instances importantes. Évidemment il n’existe aucun consortium de Juifs qui dirige le monde, c’est d’une sottise sans nom ! Un des moments forts des « complots juifs » est le début du XXe siècle. Le protocole des sages de Sion est ainsi un livre rédigé par les services secrets russes pour faire croire à un complot juif. Et encore aujourd’hui certaines personnes y croient ou disent y croire !

Ce ressort est utilisé aujourd’hui par les nouveaux antisémites dont certains deviennent trop connus comme ces ……..

d’Alain Soral1 ou l’ex-humoriste Dieudonné. Leurs discours sont les mêmes rengaines que celles servies il y a un siècle sur la nocivité des Juifs. Ils y ajoutent l’idée que le génocide des Juifs d’Europe n’aurait pas existé – ce qu’on nomme le négationnisme, le fait de nier l’existence d’un moment de l’Histoire – et la soi-disant culpabilité des Juifs dans l’esclavage.

 

Ils se servent également de la légitime indignation face au sort des Palestinien-ne-s pour promouvoir leur haine délirante des Juifs-et faire du business là-dessus par la même occasion, faut pas se gêner ! Ils opèrent ainsi une confusion volontaire entre le gouvernement israélien et tous les Juifs du monde.

Ainsi la guerre menée par Israël en Palestine devient la responsabilité de tous les Juifs du monde.

Mais c’est n’importe quoi : en Israël, en France et dans le monde, de nombreux Juifs luttent pour la paix. Sous-entendre que tous les Juifs du monde sont responsables des actes du gouvernement israélien c’est mettre tout le monde dans le même sac, c’est la même chose que de dire tous les Arabes sont des intégristes ou toutes les femmes sont des blogueuses mode en puissance.

Si l’État français prône aujourd’hui l’égalité, cela ne veut pas dire que l’antisémitisme comme le racisme n’existent plus dans la vie quotidienne. Ce sont des formes de rejet tellement anciennes, qu’elles s’expriment à travers plein de petits détails et que nous avons besoin d’un travail quotidien pour nous en débarrasser.

 

Légende :

  1. Alain Soral est un idéologue et chef d’entreprise d’extrême droite. Il a fondé un groupe nommé Égalité et Reconciliation, un mouvement qui « entend convertir au nationalisme politique les jeunes des milieux populaires, et notamment ceux issus de l’immigration ». Ancien membre du Front national, il a qualifié Jean-marie Le Pen (anti-intellectuel, homophobe, raciste, tortionnaire) d’« homme facétieux et délicat », comme quoi l’humour n’est pas mort ! Voir le texte de JBB dans Article 11 sur ce personnage « complotiste, antisémite, révisionniste et nationaliste ». Et sur cette « ultra-droite qui déteste tellement les Juifs qu’elle se contraint – effort violent – à draguer les Musulmans ». Dieudonné est très proche de Le Pen, et d’Alain Soral, même si récemment ils se sont disputés pour des histoires de gros sous.

 

 

 

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