Comment écrire un excellent roman en ayant pour héros un romancier raté et prétentieux ? Tel est le défi que relève non sans humour Louis-Bernard Robitaille dans son 5ème livre « Dernier voyage à Buenos Aires ». Jefferson Woodbridge arrive à l’âge de 20 ans à Paris. Une ville hantée par le souvenir d’Henry Miller et les palabres des existentialistes. Il nous semble alors que l’histoire va nous faire revivre la bohême débridée de cette époque là. C’est du moins en prenant appui sur cet imaginaire que va exister jefferson. Il rencontrera Magdalena une sublime jeune allemande ressemblant à Jean Seberg. Elle deviendra sa maîtresse, il voyagera avec elle et petit à petit ne la verra plus que pour s’exhiber en public à son bras. Elle trouvera d’autres compagnons, lui, d’autres passades, ils se retrouveront plusieurs fois jusqu’au dernier rendez-vous manqué. Jefferson doit retrouver Magda sur la Côte d’Azur, il différera, renoncera et apprendra par la gendarmerie que la jeune femme s’est pendue. Trente ans plus tard, apprenant qu’il va devenir aveugle ,jefferson s’apprête à faire son dernier voyage à Buenos Aires. Ce roman pourrait être celui de l’absence de prise de parole. Comment la jeune femme aurait pu supporter le passé nazi de son père et le manque d’intérêt de amant pour son histoire en forme de désespoir. Curieusement la France devient une sorte de fantasme alibi d’une Amérique sans projet et d’une Allemagne qui n’en finit pas d’expier. Louis-Bernard Robitaille a l’art de saisir la vérité du faux, des vies sacrifiées sur l’autel d’une absence de projet. Dernier voyage, derniers mensonges, la vie ressemblerait-elle à un film de Godard ? En tout cas, elle est bien ici » à bout de souffle »
Malaise. Mais au moins, les masques sont tombés.
F Bernheim
Dernier voyage à Buenos Aires
De Louis-Bernard Robitaille
Editions Noir sur Blanc / Notabilia