Le plus beau concert du monde s’est tenu à Epidaure du 17 au 25 Septembre. Pendant plus de 200 heures nous avons entendu des musiciens et des chanteurs auxquels s’étaient aimablement joints, montagnes, roches éclatées, pins, chênes- liège, cyprès, herbes, sel, mer bleue turquoise (dommage que l’on ne puisse pas dire grecquoise), vallées vertigineuses, criques paradisiaques, théâtre d’Epidaure,sites de Mycènes, Némée, Corinthe, îles de Poros, Spetses, une organisation hors pair, l’hôtel Apollon, une soixantaine de personnes dotées d’un cœur et d’une âme.
Des esprits sceptiques -il y en a- ne manqueront de faire remarquer que nos matinées étaient consacrées à des excursions, les après-midis aux bains de mer, promenades, conférences et les soirées aux concerts. Chacune des prestations donnant lieu à la mise en avant de compositeurs mondialement connus. Au pied de la lettre le constat est exact, cependant la vérité de l’événement est ailleurs. Du début à la fin de ce séjour nous avons vécu « ensemble en musique », partagé une alchimie aussi subtile et joyeuse que magique. Nous avons voyagé entre terre, ciel et mer avec l’aimable bénédiction de dieux assez amicaux pour lever leur verre d’ouzo ou de vin en l’honneur de leurs invités.
L’homme qui a composé cette musique plénitude se nomme Dimitris Saroglou, pianiste et directeur artistique du festival du Vexin.
A un moment quelque peu tourmenté de notre histoire, où chacun pourrait être l’ennemi de l’autre, la démarche suivie par «Concert dans les îles » nous rappelle opportunément qu’il n’en est rien. L’harmonie entre les êtres n’est ni impossible ni spontanée. Il suffit de la vouloir très fort d’y travailler d’arrache-pied dans le respect du talent de ceux qui vous accompagnent, en se dotant les moyens nécessaires à son accomplissement.
Ailleurs on trouve particulièrement commode de tout séparer : public, artistes prestataires, enfants irresponsables vs adultes responsables, espèce humaine vs animaux, végétaux, minéraux, musique vs arts plastiques, spectacle vivant, musées,… __dsc2393
Dimitris Saroglou et ses amis trouvent beau et grand de tout vouloir ré-unir
Le jeune homme « timide et rêveur » est arrivé en France à l’âge de 17 ans, la Grèce sous l’occupation turque avait pris un retard considérable. Pour avancer dans la vie comme dans la musique, il fallait en partir. La France lui a tout donné et un jour il a eu envie de lui rendre ce qu’elle lui avait apporté. Il a envisagé d’inviter des amis musiciens en Grèce. L’aventure n’était pas possible. Comment faire venir un piano dans une île ou sur le continent sans argent ? Tant pour raison économique que pour la beauté de l’échange, il fallait un public. En 2015, la première édition de Concert dans les îles s’est tenue à Rhodes.
La seconde vient de se dérouler à Epidaure, la prochaine encore à l’état de projet.
Ré-unir qu’est-ce que cela signifie ?
Invités à rendre visite aux dieux de l’Olympe et à remonter le fil d’une civilisation qui a nourri l’occident depuis des millénaires, nous sommes émerveillés et capables de lâcher prise. Nous laissons au vestiaire toute forme de posture sociale. Chacun retrouve alors l’harmonie qui est en lui. Chacun devient musique.
Ainsi les musiciens et chanteurs sont d’autant plus heureux de vivre à l’unisson de leur public que -pris toute l’année par leurs engagements- ils ont ici la possibilité de vivre une vie de famille harmonieuse. Ainsi on a vu des petits enfants venir embrasser leurs parents à la fin d’un concert, vu les chanteurs et chanteuses accomplir leurs prestations leurs bébés dans les bras.
En Grèce le tourisme a ses géants qui disposent de moyens ambitieux, mais fort heureusement il existe ici une autre forme de tourisme plus modeste, plus créative, où les liens familiaux transcendent les contraintes matérielles. Il en est ainsi de l’hôtel et du restaurant Apollon. Rarement, dit Dimitris, on a vu des prestataires répondre aux demandes des artistes avec autant d’à propos et de réactivité. Pour que la salle à manger transformée en salle de concert résonne correctement, ils sont allés chercher leurs tapis, ont recouvert les chaises. Dimitris découvre un vin magnifique au supermarché, aussitôt le directeur de l’hôtel en fait acheter plusieurs bouteilles. On découvre alors avec bonheur que l’art a aussi besoin de petites mains, de beaucoup de patience et de travail obscur pour exister. La démarche artistique de « Concert dans les îles » est aussi fruit de la débrouille, de l’investissement fort de chacun à son échelle, de la liberté que chacun se donne d’inventer autre chose._dsc2360
Dans « le village de musique » de Dimitri et de ses amis, les jeunes talents ont toute leur place. Malo Thévin a 14 ans, il étudie le piano depuis 7 ans, il est l’élève de Dimitris, il participe à l’un des derniers concerts de la semaine avec Alma Amoyel, 10 ans, violoniste. Malo assiste à tous les concerts du festival du Vexin. A Epidaure, il est présent aux répétitions des artistes, et échange librement avec eux. Etre ici le stimule, l’encourage à travailler encore plus fort sans pourtant avoir la moindre assurance sur son avenir artistique. Le duo entre Dimitris et son frère chanteur de variété, l’a beaucoup ému, et rappelé les chansons des années 70 que son père écoutait. Ici il apprécie la densité des personnes, leur capacité d’accueil._dsc2360 Dans les rues d’Athènes passent deux jeunes en scooter qui le saluent …cela l’enchante. Il s’enthousiasme de passer une semaine inouïe dans un lieu paradisiaque, alors qu’il devrait être au collège. Son père a pensé que le séjour pouvait être utile à sa formation. Malo, fasciné par une troupe d’équilibristes de Saint Malo, marche en dansant, en sautant, en regardant intensément tout ce qui l’entoure.
Musique des dieux !

Merci
à la Grèce, au Péloponèse, à Epidaure.
Merci à Emmanuelle Bertrand, violoncelle, Pascal Amoyel, piano, Nicolas Dautricourt et à son Stradivarius, Dimitris Saroglu pianiste, Julie Mossay soprano, Christiane-Marie Riedl, mezzo-soprano, Sébastien Parotte, baryton et à leur bébé Elizabeth, Josette Morata, piano et sa petite chienne, Gregory Houben, trompette, Dominique Parain, piano, Danielle Carmant, organisatrice tenor, Anne Saglier qui nous a fait connaitre « Concert dans les îles », Vasilis Verdelis directeur de l’hôtel Apollon, merci à la joie de tous les enfants présents, sans oublier les cuisiniers, serveurs,Lefki notre guide érudite et éclairée et les chauffeurs de bus. Tous si simples, tous si près des dieux.
François Bernheim

Sur le site du festival du Vexin – www.festivalduvexin.com
Rubrique voyage musical en Grèce, Epidaure, Némée, Corinthe
Contact : concertsdanslesiles@free.fr

Une réflexion au sujet de « Musique des dieux »

  1. Je découvre le très beau texte,si juste,si sensible,si fidèle à la réalité que nous avons vécue à Epidaure,une expérience musicale et amicale inoubliable.Merci à tous pour cette parenthèse enchantée.Merci,François,pour cette évocation.
    L’année suivante Dimitri nous offrit 0lympie,tout aussi réussi avec de belles variations.Merci encore.
    Martine Arbonville

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