Francine a l’œil vif, le geste généreux et aime assez les livres pour en lire une dizaine par mois . Pire, plutôt que d’envoyer des nouvelles de sa santé à ses connaissances, elle leur fait partager ses plaisirs littéraires. Chaque mois depuis 2002, les amis de Francine Pampuzac reçoivent les notes de lecture de cette passionnée de littérature. Tous ne lisent pas le contenu de la lettre, mais au moins ils savent que leur amie va bien. Avant d’être une grande lectrice, Francine a été directrice de création dans plusieurs agences de publicité. Elle a eu la gentillesse de nous autoriser à diffuser ses notes de lecture sur le blog de mardi ça fait désordre. Nous l’en remercions chaleureusement.
Lectures de Francine – Février 2014
En finir avec Eddy Bellegueule – Edouard Louis – ( Janvier 2014 – Seuil)
Bien sûr, c’est un roman. Mais il y une grande part de vécu, c’est évident. Le récit, à la première personne raconte l’enfance d’Eddy dans un petit village de la Somme. Famille pauvre, 5 enfants, culture télé exclusivement, racisme, machisme.. Etre un homme, c’est essentiel dans cette société, et voilà que le petit Eddy est né avec « des airs » comme on le lui dit. Et bien avant qu’il ne comprenne ce que cela veut dire, on le traite de pédé, de tapette, de tarlouse. Eddy écrit pour essayer de comprendre. Ce n’est pas un règlement de compte sachant ses parents « écrasés par les forces sociales qui les dépassaient ».Eddy s’en est sort. Son livre est un gros succès. Ce n’est pas un document, c’est un roman très fort.
La corde – Stéfan aus dem Siepen – ( Ecriture – février 2014)
Imaginez un petit village avec ses maisons aux toits de paille, tranquille, à la veille des moissons. Un matin un paysan voit une grosse corde qui sort de la forêt pour aboutir dans la prairie. Tiens ? Et ainsi démarre ce conte philosophique. Un homme va voir dans la forêt, revient bientôt, bredouille. Et la vie du village, réglée comme du papier à musique, va connaître des drames . « . Un tremblement de terre dévastant le village n’aurait pas été un fléau plus grave » que cette corde, dont on veut percer le mystère et qui n’en finit pas. Très bon. Une réflexion sur les passions humaines. En 150 pages.
Comment j’ai mangé mon estomac– Jacques A. Bertrand ( Juillard Janv.2014)
Ce livre va faire les délices des amoureux de Jacques A. Bertrand cet écrivain qui sait nous enchanter depuis « tristesse de la Balance ». Mais il faut savoir que dans ce livre, l’auteur nous raconte une rude épreuve : son cancer de l’estomac. Il avait 20% de chances de s’en sortir. Eh bien, on peut dire, après 5 ans, qu’il s’en est sorti. Et il raconte cette aventure, à sa manière si jolie. On sourit souvent : « J’ai été alarmé le jour où un radiologue avec qui j’avais rendez-vous avait demandé à sa secrétaire ; l’estomac est arrivé ? Vous voyez le style ?
Les passagers de la foudre – Erik Larson –( Cherche midi –Févier 2014)
Je peux donner un mode d’emploi pour la lecture de ce livre, si l’on n’est pas un passionné des découvertes scientifiques ( ici, la télécommunication sans fil par Marconi). Lisez le 1er chapitre où vous ferez connaissance du capitaine Kaplan à bord du transatlantique voguant vers Québec. Il repère à bord, un père et son fils qui l’intriguent. Et puis rendez vous page 439 ( oui, oui) car c’est là que ça devient palpitant. Avant vous aurez eu tous les détails sur les découvertes de Marconi, ses expériences, ses détracteurs, ses alliances, la concurrence, pendant des pages et des pages, entrecoupées quand même de la vie d’un médecin marié à une femme épouvantable. Donc, page 439, nous sommes sur le bateau, en compagnie du médecin (criminel) et de sa maîtresse, ne se doutant de rien, alors que le monde entier est au courant de leur proche arrestation. Grace à qui ?, à Marconi bien sûr .Grace à la TSF !
Ravel – Jean Echenoz – ( Editions de minuit – 2006)
Une terrible envie de relire ce petit livre qui m’avait tellement plu quand il est sorti. Eh bien, le charme a opéré. J’ai retrouvé ce petit monsieur génial, 1,60 m et 40 K. Ses escarpins vernis sans lesquels il n’est pas question de jouer en public, et ses tenues si recherchées . A St Jean de Luz il va à la plage : « vêtu d’un peignoir jaune d’or sur un maillot de bain noir à bretelles et coiffé d’un bonnet de bain écarlate » – Surement, je relirai encore cette merveille.
Unbroken – Melody Grace – ( Editions prisma – Janvier 2014)
Je lis quelque part que la France lance une nouvelle catégorie de fiction pour les 18-25 ans : des romans érotiques. Au hasard, je commande « Unbroken » C’est Juliette, 24 ans, qui , sur la route d’une maison au bord de la mer, raconte comment elle avait fui cette région, 4 ans avant, parce qu’Emerson, son grand amour, l’avait brutalement larguée après un été passionné. Il faut qu’elle retourne là-bas pour vider la maison qui va être vendue. Elle va retomber sur Emerson.. L’attraction sensuelle de ces deux personnages donne lieu à des scènes érotiques très brulantes, avec orgasmes incroyables. Mais pas de menottes, rien que du classique, mais très très hard. Si cela peut donner le gout de la lecture aux ados, bravo. C’est du rève.
Homme cherche femme – Simon Rich ( Sevil – janvier 2014)
En 30 petits textes, de deux ou trois pages, l’auteur évoque des situations de rencontre, de vie de couples, de ruptures. Et c’est très drôle. Vous voulez un exemple : « Je ne l’ai jamais avoué à Alan, mais je n’ai jamais aimé ses petites amies… aussi quand j’ai découvert qu’il sortait avec Mère Térésa, la nouvelle me transporta de joie » Vous voyez, ça démarre fort Mais le pompon, ce sont les petites annonces que les chiens envoient pour des rencontres : « Je t’ai remarquée au parc à chiens de Chelsea hier soir. Tu portais un chandail rouge et rien en dessous. Nous nous sommes reniflés.. etc » Humour newyorkais excellent. Absurde, émouvant souvent, surprenant toujours.